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Publié le : 31 octobre 2025 / Modifié le : 3 novembre 2025

Violences conjugales (2/3). « Quand j’y pensais, j’avais le ventre en vrac »

« Pourquoi suis-je restée ? » Une question qui résonne encore dans la tête de Valérie, Mélanie et Pauline*. Ces trois habitantes du Pays de Retz ont été victimes de violences conjugales dans leurs couples. Pendant quelques années, voire une grande partie de leur vie, elles ont subi la loi de leur conjoint. Toutes les trois reviennent sur ce moment de déclic, l’instant où elles ont décidé de ne plus subir et de partir.

Prendre conscience du danger, envisager la rupture, puis partir. Valérie, Mélanie et Pauline* ont subi l’engrenage d’une relation toxique, néfaste et dangereuse qui les avaient enfermées dans un quotidien de peur et de culpabilité. La violence physique comme psychologique avait pris le pas sur tout le reste. Jusqu’à ce que quelque chose, un geste, une parole, une intervention extérieure, leur ouvre les yeux.

« Il faisait tout pour m’humilier, me faire comprendre que je n’étais rien, tout en pensant que je ne partirais jamais », raconte Pauline, qui a subi les violences verbales et psychologiques de son conjoint durant dix ans. Crises de jalousie, verres éclatés contre les murs, cris… Pauline subit une colère devenu quotidienne, aggravée par une consommation d’alcool excessive chez son conjoint. C’est un geste, qui va lui faire prendre conscience du danger et de l’urgence de partir. Une énième violente dispute où elle sent les mains de son conjoint autour de son cou. « Ça a été un gros déclic. A cet instant, je comprends qu’il est allé trop loin et que je dois m’en aller ». Un moment compliqué pour la jeune femme, contrainte de prendre la fuite pour se mettre à l’abri, laissant enfants et affaires derrière elle.

« Je ne sais pas s’il y avait un jour sans violence… Les voisins me demandaient régulièrement si j’allais bien. Mais je n’étais plus en capacité de réfléchir. »

« Plus en capacité de réfléchir »

 « C’est difficile d’avoir ce déclic, parce qu’ils vous lessivent, vous vident de tout », explique Mélanie, victime des violences, physiques, sexuelles et psychologiques, durant plusieurs années. Le jour du déclic, une dispute éclate. La jeune femme s’enferme dans une des chambres de la maison. Les cris fusent. Son fils, témoin de la scène, hurle « à l’aide » jusqu’à l’intervention d’un voisin, suivi des gendarmes. « Je ne sais pas s’il y avait un jour sans violence… Mais je n’étais plus en capacité de réfléchir. Les voisins me demandaient régulièrement si j’allais bien ». Ce jour-là, elle décide de ne plus jamais revenir près de son bourreau.

Une intervention salvatrice. Tout comme celle du médecin qui a pris en charge Valérie, hospitalisée à la suite d’une lourde dépression, épuisée par l’emprise de son conjoint.

Une séparation difficile à envisager

Après environ 15 ans de vie commune, Valérie perd complètement l’appétit. Son corps parle à sa place. Elle est hospitalisée. « Il me disait que mes enfants allaient se détourner de moi. Il me terrasse, je ne suis plus que l’ombre de moi-même. Il avait réussi à me vider de ma substance », raconte-t-elle. Pourtant, l’idée d’une séparation reste encore inenvisageable, elle la terrifie. « La première fois que j’y ai pensé, j’ai eu peur qu’il demande la garde alternée. Quand j’y pensais, j’avais le ventre en vrac, c’était viscéral ». C’est un médecin, « un ange-gardien », qui l’aide à prendre conscience de sa situation. Sortie de l’hôpital, une assistante sociale en gendarmerie accompagne Valérie dans cette période transitoire, ô combien difficile pour celles qui essaient de se reconstruire.

Pour ces femmes, le déclic a mis des années à se déclencher, malgré les violences et un quotidien anxiogène. L’emprise du conjoint, la dépendance affective, la peur de l’inconnu… Tout retarde ce moment. Longtemps en apnée, ce déclic permet à ces femmes de reprendre leur respiration et ouvre la voie à une reconstruction possible.

*prénoms d’emprunt